le téléphone vibre à la ceinture. c'est kiki, comme dit ta soeur, cette grande conne de pimbêche. il t'appelle pucelle, et te réclame le prix des packs de lessives omo en promotion. « ok je te garde en ligne. » tu traverses deux rayons, slalome entre quatre vieux. « douze euros et soixante dix neuf centimes les deux paquets. va te faire foutre. » tu raccroches. tu files pour aller continuer tes étiquetages dans le rayon désert des ampoules. mais au dernier virage presque bien négocier, quelqu'un apparaît en face de toi et te fais -sans faire exprès hein- une balayette au pied droit. ton patin décolle, tu perds l'équilibre, et tombe lourdement sur le rayon. des dizaines de paquets plastiques virevoltent, et les ampoules explosent à l'intérieur sous le choc, tout dans un grand fracas. t'affiche une gueule de faon apeuré, tu tentes de te relever, glisse, et finis le cul par terre sur le carrelage.

cruiser sanglé à ton sac à dos, tu te balades dans les rayons avec un panier en te prenant pour le petit chaperon rouge. tu te pètes le dos à force de ramasser les articles les moins chers du supermarché, ceux qui sont bien tout en bas et bien cachés. puis pour la peine tu ouvres un paquet de monster munch, la seule marque que tu t'accordes d'acheter avec les kinder. t'es comme un fou quand tu vois que les surprises sont des minions donc tu ne prends même plus la peine de regarder où tu marches, bien trop occupé à calculer combien tu devais acheter de paquets de kinder surprises pour pouvoir, statistiquement, avoir tous les minions. mais on t'écrase le pied, tu couines comme un enfant et t'entend un gros boum. en te retournant tu vois une touffe blonde complètement étalée au sol, tu prends sur toi et tu ne rigoles pas. t'es sur le point de lui tendre la main pour l'aider mais elle décide de s'y prendre toute seule : un échec. c'est trop, tu ne peux pas t'en empêcher, tu pouffes comme un demeuré, te décidant tout de même à lui tendre la main pour l'aider. c'est pas la première fois que tu la vois se balader dans les rayons, mais elle y met d'habitude plus d'aisance, elle a l'air sympa mais t'as cette sale impression qu'elle ne t'aime pas. tu l'aides à se relever et lui lâche la main qu'une fois bien stable. « quand t'es tombée je crois bien avoir vu ta culotte. mais t'en fais pas, je ne dirais à personne que tu portes des sous-vêtements mon petit poney. »

tu te sens devenir rouge pivoine derrière tes spaghettis blondes qui te tombent sur le visage. t'as beau faire la grande téméraire devant tes amis, il n'en reste pas moins qu'avec les inconnus, tu es une véritable huitre. t'attrape sa main pour te remettre sur tes deux patins. sa réflexion fait virer tes joues au rouge bordeaux, genre tu ressembles à une bouteille de vin à roulette. tu rigoles un peu bêtement. « ah euh ouais je..haha c'est gentil..désolé hein. » tu commences à ramasser le bordel que t'as foutu, priant pour qu'un responsable ne débarque pas à l'improviste. ton cerveau c'est une turbine qui tourne à 3000 tours seconde. la tête du gars te dis un truc. les pizzas, ouais c'est ça. c'est lui qui est venu sonner à ta porte la dernière fois. c'est oz qui a ouvert, mais t'as vu la tête de votre traiteur low cost par dessus son épaule. mais là, t'oses rien ajouter, gros blanc de dinde entre vous deux, et tu te contente de réunir les produits cassés d'un côté, et de rattacher les vivants sur le rayon.

tu souris en la voyant rougir, c'était rare de tomber sur des filles timides, tu regardes ses joues rougir à vu de nez. tu trouves ça mignon ça manière de se cacher derrière ses cheveux. tu te décides enfin à te baisser pour l'aider à ramasser un peu tout le bordel qu'elle avait foutu. vous ne vous adressez pas un mot et ça te va très bien. une fois redressé, tu la regardes un moment dans les yeux sans rien dire, juste à réfléchir à ce que tu pourrais lui sortir sans qu'elle te prenne pour un débile complet. « sinon tu roules un peu en-dehors d'ici ? on pourrait se faire un truc un de ces jours... », tu te sens débile avec ta drague d'une élève de primaire. ça t'arrive jamais d'être gêné comme ça, tellement que tu presses le truc qui se trouve dans tes mains jusqu'à ce que tu réalises que c'est un tube de ketchup qui balance un jet de concentré de tomate sur la jolie blonde. tu la regardes avec des grands yeux, ne sachant pas quoi dire.

« euh ouais.. ouais, ouais je.. » t'essayes de retrouver la place de l'ampoule philipps, t'as les yeux perdus sur le rayon. tu fronces les sourcils, te retourne vers lui pour lui répondre correctement, sauf que t'as rien à dire. et que du toute manière un jet de tomate te saute au visage et dégouline sur tes fringues. tu restes bouche bée, à regarder la tête de merlan fris de ton assassin. t'as envie de te cacher dans un trou de souris. de mourir trois fois. mais derrière ta honte, un rire nerveux émerge de ta bouche. des gens passent devant le rayon et vous dévisage. ton rire s’amplifie. tu essuies le ketchup sur ton visage avec ta manche. tu sais pas si tes yeux pleurent de rire ou de honte. « bon euh déjà je vais aller me changer et puis on en reparle après hein... » tu vas pour tourner les talons, mais ton patin dérape sur du ketchup et tu tombes à la renverse sur monsieur, ta joue venant se collant et s'essuyer allègrement sur son tee shirt. tu l’entraînes dans ta chute, et tu te retrouves sur lui, par terre. tu lèves de grand yeux vers lui, paniqué.

tu te pinces les lèvres, ne sachant pas si tu devais rire ou te sentir mal, partagé entre ces deux sentiments la blonde tranche en riant. tu sens que c'est nerveux mais ça t'arrache un sourire. son petit rire t'amuses jusqu'à ce qu'elle décide de fuir. pendant une demi seconde t'es persuadé qu'elle ne veut plus te voir et qu'elle ne reviendra jamais mais la chance semble tourner à ton avantage. elle dérape sur le ketchup et tombe sur toi, t'as l'impression d'assister à la scène au ralenti et pourtant, t'es impuissant. tu te retrouves allongé par terre, la petite blonde pleine de ketchup sur toi. elle est pas loin d'être à califourchon sur toi et le regard qu'elle te lance te donne un fou rire. « je pensais pas que t'étais une rapide. ». tu te redresses doucement et te relève avant de prendre la blonde par les deux mains pour la soulever. vous êtes tous les deux dans un état pitoyable. elle a les cheveux plein de ketchup, on dirait des spaghettis bolognaise. « je pense qu'il vaut bien pour le bien de tous que je t’escorte jusqu'aux vestiaires. », tu lui lances ton plus beau sourire et garde une main dans la sienne. ça te rappelle des balades avec ta petites cousine quand tu lui apprenais à faire du skate.

tu te relève avec son aide. tu sais plus ou te mettre, le sang te monte une nouvelle fois aux joues. c'est gagné, entre ça et le ketchup, on dirait une véritable écrevisse pêchée dans l'heure. « ouais...et si on croise mon respons', plaide coupable s'il te plait. » tu ris, un peu jaune, voir même carrément. et puis il y a ta main dans la sienne. il a pas vraiment la peau douce. ta main elle parait toute frêle entre les muscles de ses doigts. t'avances doucement, bien assez de chutes pour aujourd'hui. au bout de quelques mètres, tu finis par oser la question qui te taraude depuis le début. « t'es livreur de pizza toi, pas vrai ?... »